Inde

Quilon - Le 30 janvier 1997


L'indispensable kit pratique indien

En excellente forme physique après quarante jours passés en Inde, les deux reporters n'oseraient cependant pas parier sur l'état de leur santé mentale. Tout a déjà été dit sur l'Inde. C'est vraiment un pays fatigant. C'est vraiment un pays intéressant. C'est vraiment un pays agaçant. Nous n'ajouterons qu'un seul conseil : s'armer d'une solide dose de patience et de tolérance. Et éviter de jouer au Français moyen en goguette. Ici, ça ne marche pas.

 

Argent. Possibilité de changer de l'argent 24 heures sur 24 à l'aéroport. Les taux sont un peu limites, mais ça dépanne. Au 1er janvier 1997, le taux de change officiel était de 6 roupies pour un franc. Ensuite, on peut facilement retirer avec cartes bleues internationales (Bank Baroda), changer ses traveller's libellés en francs ou en dollars et changer ses espèces. Les banques sont fermées le dimanche mais les grands hôtels peuvent dépanner. Au niveau budget, il y en a pour tous les goûts : de 50 francs à plus de 1000 francs par jour, selon le niveau de confort désiré, les moyens de transports utilisés et les restaurants fréquentés. Attention à ce dernier poste de dépense, les microbes frappant souvent dans la catégorie la moins chère. Nous avons vérifié pour vous, ce qui nous a valu une visite accélérée du Taj Mahal et une visite approfondie du médecin du coin.
Aéroport. L'arrivée des vols internationaux, c'est souvent la nuit et c'est toujours la cohue. Quarante chauffeurs de taxis illégaux s'accrochent au sac à dos, tirent dans tous les sens et hurlent qu'ils sont moins chers que les autres. Les ignorer royalement, distribuer des coups de sacs et sortir de l'aérogare. Sur la droite, vous trouverez un guichet pour les taxis officiels. Vous payez la course avant de monter. Ensuite, c'est tout confort. Aucune arnaque possible. Pour un premier voyage en Inde, réserver une première nuit d'hôtel depuis la France se révèle une bonne idée qui évite quelques angoisses nocturnes : « Tout est plein. On fait quoi ? ».
Baguette. Un petit déjeuner avec des croissants et une baguette, ça n'a peut-être l'air de rien. Mais quand vous aurez goûté au « poulet masala » et autre « poisson curry », vous comprendrez pourquoi une boulangerie française installée à Bombay brasse les millions de roupies. La boulangerie qui a illuminé notre journée de Noël est installée au rez-de-chaussée du « Taj Mahal », l'hôtel mythique de l'Inde (Pascal Bruckner en parle dans son livre « Parias »). Tous les chauffeurs de taxis connaissent. Bombay. En haute saison (novembre à février), les prix des chambres atteignent les prix parisiens et les hôtels sont souvent pleins. Nous avons déménagé quatre fois avant de trouver la perle rare, pas trop inconfortable, propre et qui convienne à notre porte-feuille. Nous avons tellement galéré qu'il nous semble cette fois utile de conseiller une adresse : Fernandez Guest House, Heredia Marg, Ballard Estate, Bombay (tel : 00.91.22.261.0554). Ce n'est pas top confort mais tout est propre pour 400 roupies la nuit. Atout : chambres immenses. Inconvénient : douches froides. On peut demander un saut d'eau chaude. Au début, on observe bêtement le seau et on se demande comment ça marche. D'où notre astuce du mois : le gant de toilette.
Coup de coeur. Une province du sud-ouest de l'Inde, appelée le Kerala ! Il y a évidemment des croisières inoubliables sur les canaux tropicaux qui sillonnent la région (voir carnets de route) mais il y a surtout la nonchalance et la gentillesse des habitants. Après les frénésies du nord de l'Inde, tout cela est bien reposant. Nous nous sommes arrêtés une grosse semaine dans une toute petite ville (300.000 habitants, mais nous sommes en Inde!) appelée Quilon pour écrire nos carnets de route. Il n'y a rien à faire, si ce n'est de belles balades en bateau. Et rencontrer des habitants adorables... Une adresse à retenir : l'hôtel Yatri Nivas à Quilon. Une immense bâtisse orange et crème, construite sur les rives d'un lac. Le service est gentil mais particulièrement mauvais. Par contre, la vue sur le lac et la ville de Quilon est géniale. Coups de gueule. Il y a eu beaucoup, mais nous décernons notre palme aux règlements à la noix qui encombrent l'industrie du service (public ou privé) en Inde. Les banques mettent trois heures à faire le change. Les hôtels gouvernementaux affichent un service déplorable. Chaque petite formalité devient ici un calvaire potentiel. Il est vrai que 935 millions d'habitants, ça fait du monde. Les queues sont certes inévitables. Mais les tonnes de paperasseries, les bâillements des fonctionnaires, le harcèlement permanent des vendeurs de rue, l'absence des guichetiers, les règles de sécurité aussi stupides qu'inefficaces... Tout cela est-il vraiment nécessaire ?
Danger. Attention aux accidents de la route en Inde. Chaque année apporte son lot de drames. Les Indiens conduisent n'importe comment. C'est la loi de la jungle, avec une seule règle : la priorité au plus fort. On ne compte plus les carcasses de voitures ou de bus croisés dans un sale état. L'hôpital Bichat (spécialisé en médecine tropicale, Paris) nous avait prévenu : les accidents de la circulation sont la première cause de rapatriement des étrangers. Information confirmée par l'ambassade et le consulat de Bombay. Nous avons partout privilégié le train, très confortable et pas beaucoup plus cher que le bus. A Goa, où la circulation est un peu plus tranquille, de nombreux Européens louent des motos pour se déplacer. Sans casque, en jean et torse nu. Ca fait cool, très James Dean. Rappelons que le monsieur n'a pas eu une fin très heureuse. (And special thanks to Jeroen and his girlfriend for lending us their bike and... their bodies !!!)
Electricité. 220V. Tout pareil que chez nous. Monsieur peut amener son rasoir électrique, Madame son séchoir. Guides. Ce n'est pas parce que Lonely Planet nous a aidé à monter notre voyage que nous faisons ici la promotion de son guide sur l'Inde. C'est vraiment parce que c'est de loin le meilleur. Des milliers d'adresses d'hôtels et de restaurants, toutes les régions couvertes même les plus reculées, une édition récente en français et des informations générales de haut vol. Le Guide du Routard « Inde du sud » ne fait vraiment pas le poids.
Habillement pour les filles. Quel soulagement... Fini les sacs à patates. Vous pouvez porter à Bombay et New Delhi vos chers habits européens. Un jean, même avec la marque du slip. Un tee-shirt, même avec la bretelle du soutien gorge qui dépasse. Des cheveux à l'air libre. On a même vu des Indiennes en mini jupes et en tee-shirts moulants. Les étrangères qui s'y essaient se font reluquer de partout, mais ça ne va pas plus loin. Certaines occidentales sont scotchées à leur sari, très confortable pour la chaleur (C'est aéré de partout, surtout de l'estomac). Attention tout de même dans les endroits reculés (genre la campagne, ça fait quand même de l'espace). Le sac à patate y reste fortement apprécié.
Internet. Internet en Inde, ça existe. Mais mieux vaut être résident qu'itinérant. Pour se connecter au réseau des réseaux, la seule solution est de souscrire au provider national VSNL. Le problème c'est qu'il faut prendre un abonnement à l'année : 5500 Rs (environ 900 FF) pour l'e.mail et 15000 Rs (environ 2500 F) pour un accès de 500 heures au Web. Inutile de chercher une société privée moins chère : le VSNL garde le monopole. C'est pourquoi les carnets de route du Pakistan et d'Inde arrivent en bloc et pas régulièrement.
Jean-Marie Colin. L'homme venu du froid (-15°C à Nancy avant le départ) a bien supporté le choc thermique (+30°C à l'arrivée). Venu nous ravitailler (pellicules, médicaments, chamallows et documentation), le père de Matthieu a trouvé l'Inde parfois « glauque », mais somme toute « géniale » (je cite). Il s'est même fait des copains (voir photo). Merci pour tout.
Marie-Thérèse Colin. L'envoyée spéciale de l'Est Républicain à Cochin a dû se camoufler pour échapper à la surveillance des services spéciaux (voir photo). Le café, trafiqué par des âmes mal attentionnées, n'a même pas réussi à la distraire de son reportage. Tout s'est bien déroulé. Merci pour tout.
Meilleure saison. L'hiver européen (novembre à mars) est la période idéale pour un voyage dans le sud de l'Inde. Ici, c'est aussi l'hiver, mais avec des températures qui oscillent entre 20 et30°C. En 45 jours, nous n'avons pas vu une seule goutte de pluie. Pour visiter le nord du pays, il est préférable d'éviter décembre-janvier-février si l'on est pas fanatique du froid. Pour toute l'Inde, il est préférable d'éviter la mousson (juin-juillet-août-septembre selon les régions). Non seulement il pleut tout le temps, mais en plus, les voies de communication sont paralysées.
Pierre-Hugues Lejeune. Pierre-Hugues, 26 ans, est assigné à résidence à Cochin par les autorités indiennes, en compagnie de cinq autres marins, quatre Français et un jeune Malgache. Arraisonné pour recherche illégale en mer en décembre 1995, l'équipage du catamaran le Galathée est maintenant menacé d'être accusé d'espionnage. Des soupçons « hors de proportion » affirment les six hommes, qui affirment que leurs activités en mer n'avaient rien à voir ni de près, ni de loin, avec de l'espionnage. Ils ont passé cinq mois de prison dans les geôles indiennes et sept mois à Cochin, assignés à résidence avec obligation de pointer au poste de police chaque jour. La justice indienne ne les a toujours pas jugés, ni même formellement inculpés, malgré les demandes pressantes du Quai d'Orsay, qui aimerait voir cette affaire se clôre rapidement par une expulsion du territoire. Si vous séjournez à Cochin, un petit bonjour à Pierre-Hugues et ses compagnons d'infortune leur ferait plaisir. Voilà une année qu'ils n'ont pas revu la France, assignés à résidence et emprisonnés pour des motifs qui leur semblent bien obscurs.
Pollution. A New Delhi, les habitants répètent sans cesse qu'ils vivent dans la ville la plus polluée du monde. L'air frise effectivement l'insupportable. Un seul conseil : prendre un petit foulard (porté autour du cou, ça fait aventurier) pour pouvoir se le coller sous le nez lorsque le gros bus Tata (« made in India ») dégaze juste à côté de vous. Se munir de d'antibiotiques pour les infections respiratoires n'est pas non plus une mauvaise idée. La bonne nouvelle, c'est qu'à Bombay, ça s'arrange. Merci la mer.
Safari photo. Nous nous sommes régalés. Nous avons désormais un bon copain rat, rencontré dans une chambre du Safari Hotel de Agra (réservations au 00.91.562.36.00.13). La bestiole nous aimait tellement qu'elle a grimpé au troisième étage pour nous faire des coucous à travers la grille d'aération. Ca a duré toute la nuit. Ailleurs, nous avons sympathisé avec des cafards dans les salles de bains. D'autres choses noires, grimpantes ou glissantes, visqueuses ou craqueleuses, nous saluaient très régulièrement. Restent aussi les moustiques, particulièrement avides de faire la connaissance de notre groupe sanguin. Si vous craignez qu'autant de visiteurs nocturnes ne finissent pas menacer votre tranquillité, nous vous conseillons la moustiquaire soigneusement fermée. Et accessoirement, les boules Quies pour ne pas entendre les frottements des petites pattes noires et velues sur le sol de votre chambre.
Téléphone. Des officines privées appelées ISD/STD permettent d'appeler l'international. Il y en a absolument partout. Une petite pancarte jaune les signalent. C'est simple, très pratique et relativement raisonnable en matière de coût (10 FF la minute pour n'importe quel pays, Etats-Unis excepté). On peut parfois y trouver des fax, un peu plus onéreux (compter 20 FF la minute).
Temps. Les occidentaux et les Indiens n'ont décidément pas la même notion du temps. Le temps est élastique, il faut s'y faire. Et c'est encore pire au sud du pays, qu'on se le dise. Prévoir d'énormes pavés (minimum 600 pages) à déguster dans les trains, les bus, les banques, les restaurants, les cafés, les bateaux... Nous avons aimé : « Albert Londres, vie et mort d'un grand reporter » (470 pages, un peu court), « The Chamber » (570 pages, thriller), « The Pelican Brief » (480 pages, thriller), « The jury » (600 pages, thriller). Ces trois derniers sont de John Grisham, un auteur américain à conseiller à tous ceux qui lisent l'anglais et qui aiment les histoires flippantes qui n'en finissent pas. Toutes les librairies indiennes proposent ses ouvrages pour une centaine de roupies (environ 20 FF). On peut échanger ses bouquins dans des magasins qui font de l'occasion. Et si vous avez toujours rêvé de trouver le temps de vous enquiller l'histoire de France de Michelet (20 volumes, 10.000 pages) ou la totale de Barbara Cartland (100 volumes, 20.000 pages), l'Inde est un pays pour vous.
Vie nocturne. Aucun problème pour sortir. L'Inde propose de nombreuses activités. Toutes les grandes villes ont des discothèques dans les grands hôtels. Les cinémas proposent pour leur part quatre séances par jour, avec une majorité de films hindis et parfois quelques superproductions américaines (en décembre-janvier, « Independance Day » a fait un malheur). On trouve aussi des bars à bières dans les villes du nord. Dans le sud, on peut voir des spectacles traditionnels indiens (musique et danse). A Goa, autre programme : le must est de repérer les « grosses teufs », des raves-parties géantes organisées sous les cocotiers fluorisés pour l'occasion. Des charters entiers débarquent de Londres tous les weeks-ends. « Le top, c'est quand le DJ t'amène jusqu'à l'aube et que tu souries complètement défoncé devant le soleil qui se lève ». David, 22 ans. « Je suis super cool ». On avait deviné.
Visa. Tout confort par rapport aux autres pays que nous avons déjà traversés. Se rendre à l'ambassade d'Inde à Paris, ou les appeler pour qu'ils vous envoient le formulaire. Le compléter, le rendre avec le passeport et se présenter quelques jours plus tard pour le récupérer tamponné. Ou l'attendre par la poste. Compter 120 francs pour un visa de tourisme, entrée simple, valable trois mois. Se conformer strictement aux règles indiquées sur le formulaire, sinon tout est à recommencer. Etre très poli (voire obséquieux) avec les dames au guichet. Ne surtout pas perdre son ticket, comme à la boucherie. Un bon avant-goût de la bureaucratie à l'indienne.

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