Iran

Iran - Le 1er novembre 1996


Iran, comment ça marche ?

En excellente forme physique et mentale après vingt-cinq jours passés en Iran, les deux reporters vous livrent en exclusivité tous les trucs qu'ils ont expérimenté pour vous en Iran. Mieux qu'un guide, une suite d'avis partiaux sur le pays. Comme en Turquie, nous nous permettons ici plus qu'ailleurs de quitter la casquette du journalisme objectif, pour celle des Français en voyage, égaux à eux mêmes...

 

Argent. Possibilité de changer de l'argent 24 heures sur 24 à l'aéroport. Au 13 octobre 1996, le taux de change officiel était de 3000 rials pour un dollar. A Téhéran, compter 10.000 rials pour un repas, 7.000 rials pour une heure de taxi (les distances sont très longues à Téhéran), 100.000 rials minimum pour un hôtel confortable (souvent exigés en dollars pour les étrangers), 10.000 rials pour un hôtel sommaire, avec douche froide, toilettes innommables et lits spartiates. En province, le coût de la vie est moindre. Autoroute. Elles sont facilement identifiables. Vous roulez sur trois voies. Vous remarquez qu'elles sont bitumées tout neuf, éclairées et en assez bon état. Vous croisez soudain un énorme véhicule, tous feux éteints en pleine nuit, roulant à tombeau ouvert sur la voie la plus à gauche. Dans le sens inverse, évidemment. Aucun doute, vous êtes sur une autoroute iranienne.
Caviar. Oui, c'est une spécialité iranienne. Oui, c'est difficile à trouver. Oui, c'est très cher. Oui, nous en avons goûté. Oui, c'est bon. Merci à l'ami qui nous en a offert, nous lui jurons reconnaissance éternelle. Sinon, ça s'achète à l'aéroport. Ca coûte 1000 francs le kilo. Environ. Pour les curieux, ajoutons que ça sent l'oeuf d'esturgeon en dix mille fois meilleur (d'ailleurs, nous n'aimons pas l'oeuf d'esturgeon). Ca se mange sur du pain beurré. Et on ajoute une larme de jus de citron pour que ça soit encore meilleur. En fait, c'est divin.
Douanes. L'arrivée à l'aéroport ressemble à une gigantesque course poursuite. Les 250 passagers de l'Airbus se pressent vers la sortie. Pas vous. Vous ne savez pas. Eux, si. Le royaume de la file d'attente commence à la descente de l'avion. Heureux les premiers, ils arriveront les premiers. Premiers au contrôle du passeport. Premiers aux contrôles des bagages. Premiers aux contrôles des importations. Premiers aux taxis. Attention aux restrictions en douanes : nombre de pellicules, nombre d'appareils photos, magazines féminins, musique rock, etc. Bien se renseigner au départ. Et ne pas rigoler avec ça. Vous seriez tout seul à rigoler. Douanes, suite. Une astuce pour ceux qui pénétrent pour la première fois sur le territoire iranien : prendre la «green line». Elle permet de traverser plus rapidement les formalités en douane. Quand la dame vous demande si vous n'avez rien à déclarer, vous dites «no» (non). Si vous avez de la chance, vous passez en zone libre. Si vous n'avez pas de chance, vous reprenez la «red line» (ligne rouge) et vous attendez la fouille. Comme tout le monde.
Ersad (prononcer «erchade»). Le sympathique «Ministère de la pensée islamique», qui avait pour mission d'organiser nos interviews à Téhéran, a sorti le dossier «Colin-Idoux» à la seconde où notre Airbus a atterri. M. Abdolahi, responsable des journalistes étrangers, n'a cependant pu commencer à s'occuper de nous que quelques heures avant notre départ de la ville. Il faut dire que nous n'avons pas facilité les choses : un séjour éclair (huit jours) entrecoupé par un week-end. A Ispahan, le Ersad local a repris le relais : suivi de près par notre guide, nous avons enfin pu visiter des écoles primaires. Accompagnés par tous les officiels de l'éducation que compte la ville.
Habillement. Pour les filles : premièrement, porter un voile qui cache les cheveux. Deuxièmement, porter un «rupush», un manteau léger qui descend minimum jusqu'à mi-mollets. Troisièmement, porter une chaussette opaque qui masque bien la cheville, objet de vénération sexuelle bien connu. Quatrièmement, adopter les manches longues, les bras faisant également partie de ces parties du corps terriblement érogènes. Cette dernière recommandation concerne aussi ces messieurs, bien qu'on tolère (dans les grandes villes) quelques délires vestimentaires. Genre polo à manches courtes.
Mausolée. L'une des expériences les plus marquantes de notre séjour à Téhéran. Certains guides y ont vu une «sympathique promenade du dimanche». Y sommes-nous passés un soir de cérémonie spéciale ? Femmes et hommes en pleurs, imam en transe, militaires dans tous les coins... Nous en sommes sortis bouleversés par l'idolâtrie manifestée ici envers l'ayatollah Khomeini.
Pédalo. L'un des meilleurs souvenirs de Matthieu. Doté de grandes jambes, ce dernier était condamné à se plier en quatre dans les pédalos. Impossible de pédaler. Guylaine suait pour deux sous ses voiles, sur la rivière d'Ispahan et sur les lacs artificiels de Téhéran. Atmosphère bien sympathique par ailleurs, l'isolement sur l'eau constituant une des meilleures méthodes pour aborder les familles iraniennes de sortie. Et discuter tranquillement, loin de tout, notamment de la paranoïa parfois manifeste à terre.
Panne. Si vous deviez subir l'explosion d'un pneu dans le désert, comme nous, choisissez un taxi malin. Pas comme nous. Première règle : vérifier que le monsieur a bien la clé de l'énorme cadenas qui protège sa roue de secours. Deuxième règle : vérifier que les écrous de la roue ne sont pas ronds, à force d'être usés. Troisièmement : vérifier que la roue de secours n'est pas crevée. Sinon, il vous reste un joker : les monstres roulants qui parfois s'arrêtent pour vous prêter main forte. Très forte.
Prix. Impossible de se faire une idée du coût de la vie, qui a oscillé pour nous entre celui de Paris et celui de Dacca (Bangladesh). Pile ou face. Chauffeur gentil, trois francs la course. Chauffeur énervé sur la fin, vingt dollars la course. Glace au chocolat avec ami persan, deux francs. Glace au chocolat sans ami persan, quatre dollars... Toujours est-il que la glace est bonne. Routes. Spécialité locale : accélération aux carrefours afin de passer avant les autres, même si le feu est rouge («Quoi, le feu ? Qu'est-ce qu'il a, le feu ?»). Trouille maximum assurée. Prenez des milliers de voitures, des gros camions surchargés, des bus en mauvais état, agitez le tout puis mettez dans le désordre sur les routes. Ajoutez des feux tricolores et des policiers pour faire joli. En fond sonore : les klaxons. Entre les voitures : les piétons. Ca passe ou ça casse. On n'a pas encore compris comment, mais ça passe. Le plus souvent...
«SOS touristes en difficulté». Joignable 24 heures sur 24 en Iran. Dans la rue, au restau, à l'aéroport, à l'hôtel, dans les magasins... Partout, quelqu'un s'est mis en quatre pour nous aider. Parmi nos expériences les plus marquantes : un vendeur de Coran sur CD-Rom, qui ne parlait ni anglais ni français, a accepté de poser pour les photos de Matthieu pendant une dizaine de minutes, sourire en prime. Un chauffeur de taxi nous a payé des bonbons. Une station de bus nous a commandé un taxi. Une adolescente a répété une dizaine de fois en persan la même question à des passants pour nous trouver une adresse. Le réceptionniste de l'hôtel appelait pour nous les standards des administrations pour demander la bonne personne. Il est allé jusqu'à nous téléphoner dans la chambre, croyant que nous avions oublié l'un de nos rendez-vous !! De très nombreuses personnes sont d'une gentillesse incroyable et ont tout fait pour nous aider. Une hospitalité qui a déteint sur certains Français en poste en Iran : Christophe de Roquefeuil, à l'AFP, a ainsi été d'une gentillesse et d'un soutien rare. En plus, il est sympa.
Visa. Compter plusieurs semaines (voir plusieurs mois) pour l'obtenir. Si vous ne réussissez cependant pas à obtenir le visa de tourisme à l'ambassade d'Iran à Paris, il vous reste deux autres possibilités : demander un visa de transit, qui permet d'entrer dans le pays depuis la Turquie, pour entrer ensuite au Pakistan. Petit inconvénient : il vous faudra obtenir d'abord le visa pakistanais. Autre possibilité : obtenir son visa de tourisme depuis Istanbul ou Ankara (délai de dix jours). Petit inconvénient : aucune garantie que ça réussisse... Une petit note optimiste cependant : l'Iran a affirmé l'été dernier -via son agence de presse officielle- que les visas de tourisme deviendraient plus facile à obtenir pour les Européens. A savoir : tout type de visa se renouvelle facilement une fois qu'on a pénétré le territoire. Nous avons rencontré des voyageurs heureux, qui étaient arrivés à rester deux mois en Iran, à partir d'un visa de transit de cinq jours.
Vendredi. Tout est fermé. En Iran, vendredi, c'est dimanche. En profiter pour se rendre à l'Université de Téhéran. Ecouter la prière grâce aux dizaines de haut-parleurs installés dans tout le quartier, bouclé par des centaines de gardes de la Révolution. Avoir une inspiration soudaine et vouloir voir la prière. Compter une heure d'attente (fouille comprise, tabouret fourni pour les femmes) avant de pouvoir observer hommes ou femmes en prière collective. Un rideau sépare les deux camps (XX et XY). Service d'ordre plutôt gentil, après la fouille («Pourquoi la dame aux cheveux mi-longs bruns, yeux bruns, 25 ans, nationalité française, aucun signe particulier, a t-elle dix-sept gélules d'Intétrix, trois Doliprane, deux Nanas et treize Micropur dans la poche avant droite de son sac à dos en tissu noir de marque américaine à bandes fluorescentes ? Elle n'est pas malade, j'espère ?»). Public non hostile. Les «Mort aux USA» et les poings tendus ne nous étaient pas destinés.
Zam-Zam. Boisson «Made in Iran». Elle a le goût du coca, l'aspect du coca, mais ce n'est pas du coca. C'est la seule boisson servie dans les restaurants, avec parfois de la bière islamique (sans alcool, pas vraiment terrible) et du soda à l'orange. Trouver de l'eau minérale est mission quasi-impossible. L'eau du robinet est cependant réputée pour sa pureté. On peut normalement la boire sans craindre de tomber malade. Nous sommes en pleine forme.

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